Le café d’ailleurs (petit nouvelle)

 

18 heures, Eric faisait ses courses comme à son habitude, ce vendredi soir. C’était un vendredi 13 mais pas de celui qui porte malheur, un vendredi comme un autre jour en somme.

 

Il tournait avec son caddie, le long des rayons, achetant la viande, le lait, le fromage, passant à l’étal des fruits et légumes, achetant ses pommes de terres, soupesant un melon d’un jaune presque citronné, une variété d’Espagne d’après l’affichage.

 

Il arriva au rayon des bouteilles de vins et choisit un petit bordeaux. Au loin, au bout d’une rangée de bouteilles de jus d’orange, il aperçut un vieux monsieur, les vêtements abîmés, c’était celui que nommait communément les caissières, l’aristocrate de l’hyper, un aristocrate un peu pauvre. Non loin de lui, à quelques rayonnages, Eric aperçut lors d’un bref mouvement de son caddie vers la rangée de gauche, deux jeunes encagoulés avec des sortes de casquettes aux initiales de New-york. C’était un vendredi et Eric contemplait ces vies sauvages, de celles que la société castratrice n’avait pu désavouer. Mais, pour lui, ces scènes étaient déja presque une habitude, ces personnes, ce vieux monsieur, ces jeunes, ces caissières, il les voyait chaque semaine et chaque semaine il se disait: « L’ordinaire de la société est au supermarché. »

 

Et lui, il voulait de l’extraordinaire. Il remplit son sac cabas des quelques produits alimentaires manquants et se dirigea vers la caisse ou on lui factura la somme de 28 euros. C’était un petit ravitaillement.

 

La caissière lui fit un demi sourire lorsqu’il franchit le sas devant le tapis roulant. Mais Eric lui répondit par une moue des plus familière.

 

La caissière,dans sa petite robe cintrée, le teint pâle, les cheveux d’un blond chatoyant, le regard détendu, le corps dans l’équilibre du charme, avait glissé délicatement les produits sur l’étal en bout de caisse. Eric étant comme ailleurs, rangea machinalement les aliments dans son cabas.

 

Il voulait de l’extraordinaire et son quotidien l’agaçait.

 

Il sortit du supermarché, d’une démarche presque robotique, quand soudain, une grande jeune femme de presque 1M80 l’appela d’une voix charitable.

 

-Monsieur, Monsieur, s’il vous plait!

 

Elle avait une tenue d’hôtesse plutôt distinguée, d’un accord de bleu et de noir qui fit dire à Eric qu’il s’agissait là d’une proposition commerciale, peut-être pour un prospectus qu’on distribue gracieusement à la sortie du magasin.

 

Il s’approcha de la jeune femme:

 

-Oui, Mademoiselle, qu’y a t-il?

 

-Monsieur, lui dit-elle glissant quelques mots avec retenu. Voulez-vous déguster un café dans un endroit chaleureux?

 

Eric sourit, cette proposition si elle était pleine d’étrangeté dans son imagination native lui plut en cet instant. Il voulut prendre ce risque, ce risque de l’inconnu.

 

-Je vous suis Mademoiselle admonesta t-il d’un hochement de tête.

 

Bientôt, il se vit avancer dans la rue avec devant lui une grande jeune femme aux talons joliment ajustés, au tailleur entouré d’un doucereux parfum.

 

Ils marchèrent peut-être sur 20 mètres quand à l’angle d’une rue , un haut building métallique leur fit face, de ces sortes d’immeuble qu’on imagine américain de part la notoriété de l’image et qui sont peut-être anglais, voir suédois ou allemand de fabrication.

 

Eric eut un instant un peu peur devant la porte de l’ascenseur gris métal. Mais l’hôtesse qui s’appelait Irina le rassura de sa voix de cristal. Il montèrent dans l’ascenseur. Eric eut comme un désir qui l’envahissait, un cours instant, le désir qu’entretenait le parfum de cette femme.

 

Arrivé au 1er étage, elle l’introduisit dans une grande pièce avec des fauteuils de cuir noir. Là d’autres personnes comme lui étaient installés.

 

Devant lui, on dressa différentes petites soucoupes et tasses, avec un liquide dégageant toutes sortes d’odeurs de café.

 

Du café avec des arômes amères, caramélisés, torréfiés avec expérience. Un café de Cuba, du Pérou ou d’une autre destination, peut-être d’une terre de Colombie qu’on ne connaissait plus.

 

Il goûta ces cafés, dans l’ambiance chaleureuse. Il se disait, c’est extraordinaire,  à chaque café , on me demande mon avis. Il devait mettre sa note, sa remarque.

 

Il était déja 19H10 lorsqu’on lui apporta sur une soucoupe comme extraite d’un coquillage pourpre, un café sirupeux, parfumé comme il n’en avait jamais bu, ou bu dans une autre vie.

 

Il eut un haut le cœur, un tremblement d’un coup, sa respiration s’emballant.

 

Il but le café d’un trait puis reprenant son sac cabas et son manteau il sortit prestement, le visage un peu en sueur.

 

L’hôtesse Irina ne le vit pas partir.

 

Il arriva chez lui à 20 heures, ouvrant rapidement le frigo pour prendre un grand verre d’eau. Sa femme était rentrée et l’attendait dans le salon. Une odeur doucereuse de café parcourait la pièce.

 

Dans une soucoupe blanche, Eric sentit la même odeur, le même café sirupeux que celui qu’il avait pris avec l’hôtesse.

 

Sa femme lui demanda: « Tout c’est bien passé chéri? »

 

Eric avait la gorge nouée et l’interrogeant,

 

-Mais quel est ce café?

 

Sa femme lui sourit et dans un bref mouvement de la main, tournant sa cuillère dans la tasse lui répondit: « C’est ce café, souviens-toi que nous avions bu en Andalousie, pour notre nuit de noce.

 

Eric eut un bref tressaillement, c’était l’extraordinaire….!

 

Dans la même journée, il avait vu d’un jour, l’inconnu se produire et son histoire d’amour.

 

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A propos François Térrog

Mr Gorret François écrivant et chantant sous le pseudonyme de Mr Térrog François est un homme de 39 ans, originaire de Bretagne, qui propose des articles, des écrits, de la musique, des poèmes personnels et aussi des découvertes, des textes, des poèmes de grands auteurs ect.....

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